Description

Extrait
" L'amateur de littérature italienne peut être frappé du fait que, parmi les plus grands, trois sont des écrivains de Sicile, qui ont tiré leur inspiration de la Sicile: Giovanni Verga (1840-1922), le fondateur du roman moderne avec Les Malavoglia (1881) et Mastro-don Gesualdo (1890), sans oublier ses nouvelles dignes des meilleurs Russes; Luigi Pirandello (1867-1936), dramaturge, romancier et nouvelliste; Leonardo Sciascia (1921-1989), qui vécut en Sicile et n'écrivit que sur elle.

Ces étoiles font partie d'une constellation: citons Federico de Roberto (1866-1927), auteur des Princes de Francalanza (I Vicere, 1894), et Luigi Capuana (1839-1915); Giuseppe Antonio Borgese (1882-1952) dont Desjonquères nous a fait connaître les nouvelles, et Goliath, son essai sur le fascisme; Vitaliano Brancati (1907-1954), maître avoué de Sciascia, auteur du Bel Antonio (1949) et des Années perdues (1941), variation hallucinante sur la tour de Babel; Elio Vittorini (1907-1966) et sa Conversation en Sicile (1941). Sans oublier le premier best-seller de la péninsule, issu des Princes de Francalanza, Le Guépard (1958) de Giuseppe Tomasi di Lampedusa (1896-1957), aux significations toujours renouvelées.
Peut-on avancer des raisons à cette explosion de talents en une aire si réduite, qui concerne presque exclusivement la Sicile orientale et sud-orientale? Tocqueville avait remarqué la division existant entre l'Ouest latifundiste et oppressif et l'Est autour de l'Etna, dont les éruptions favorisaient la petite propriété, un orient gouverné par l'effort honnête et le scrupule porté aux valeurs de l'individu. Toutes dimensions favorables à l'écriture. À partir du XIXe siècle, l'exploitation du soufre insère l'île dans la production européenne et, pour ce qui nous concerne, produit un double effet: d'un côté, les mines entretiennent des rentiers (Verga et, pour un temps, Pirandello) qui peuvent se consacrer à la littérature; de l'autre, elles contraindront les meilleurs de leurs fils à porter attention aux problèmes sociaux, graves et innombrables, et à faire de l'écriture un instrument de défiance, d'analyse de promotion. Sciascia aime rappeler qu'il est fils de mineur et que son pays minier est terre d'écrivains: Pirandello, son voisin d'Agrigente, mais aussi Alessio di Giovanni (1872-1946), Rosso di San Secondo (1887-1956), Nino Savarese (1882-1945), Francesco Lanza (1897-1933). L'écriture enfin porte avec elle la nostalgie, en un siècle où l'île change vite, sans que pourtant rien ne change: "Qui possédait un diplôme écrivait une tragédie, qui ne possédait pas de diplôme l'écoutait attentivement ou la jouait, et qui avait fait des études supérieures la jugeait avec gravité", écrit malicieusement Brancati, parlant explicitement des "Siciliens en général".

Qu'en est-il aujourd'hui de la Sicile littéraire? Quatre œuvres de registres très différents, mais qui portent leurs regards sur un même objet, vont nous le dire plus précisément."

Titre

La Sicile littéraire

Créateur

Éditeur

Encyclopædia Universalis, Universalia

Date

1991

Langue

Format

pp. 423-425

Source

Site Mes Italies,Maurice Darmon
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Droits

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