Regards sur l’Orient au XIXe siècle, interrogations pour notre temps
Description
[Extrait]
Du fantasme à la quête de vérité : visions occidentales de l’Orient au XIXe siècle Le Musée des Beaux-Arts de Dijon réunit les œuvres présentées dans une référence commune au « Grand Tour ». Apparu au XVIe siècle et encore très pratiqué au XVIIIe siècle, ce voyage initiatique devait permettre aux jeunes aristocrates européens qui s’y adonnaient de parfaire leur éducation. Il concerna d’abord le sud du continent. L’efficacité grandissante des moyens de transport couplée aux ambitions expansionnistes de pays tels que la France et la Grande-Bretagne élargirent les perspectives à des territoires plus lointains, sous domination ottomane : Grèce, Égypte, Maghreb... Au gré du XIXe siècle apparaît autour de la Méditerranée ce que l’exposition du MBA qualifie d’ « Orient remodelé », transformé parles conquêtes coloniales, les luttes d’indépendance et d’influence. Elles structurent tout au long de la période la lancinante « Question d’Orient ». Mais quel(s) Orient(s) le XIXe siècle occidental regarde-t-il ?L’histoire de ces regards est d’abord celle d’une fascination. Elle trouve ses racines dans un attrait ancien pour un Orient avant tout imaginaire, voire fantaisiste. Déjà sensible au XVIIe siècle, ce goût européen pour l’Orient se mue au XVIIIe siècle en véritable engouement pour l’exotisme.Les premières décennies du XIXe siècle s’inscrivent dans cette tradition et sont souvent caractérisées par une vision pittoresque et/ou fantasmée de l’Orient. Les représentations stéréotypées sont alors déterminées par les demandes d’un public occidental qui demeure en demande d’exotisme. Alors que l’influence européenne s’affermissait sur les rives de la Méditerranée, on notera d’ailleurs dans la production orientaliste la tendance quasi-exclusive à l’occultation de la présence occidentale afin de laisser s’exprimer le plus largement la vision des « charmes de l’Orient ». Parmi ces visions attendues, l’image de la femme est fréquemment convoquée, notamment par la représentation del’odalisque. L’exposition du MBA rappelle à cet égard le poids de la traduction des Mille et Une Nuits, en 1704, parAntoine Galland sur un Occident qui, dès lors, « a rêvé la femme orientale », objet de fantasmes et empreinte de lasensualité du harem. Ceux-ci étaient d’autant plus forts que la réalité intime des femmes orientales est restéequasiment inaccessible aux artistes. La figure féminine est dès lors fréquemment investie d’un érotisme revendiquédont l’odalisque devient un symbole récurrent. On ne manquera pas, à nouveau, de remarquer les implicationscontemporaines de ces observations quant au statut social et aux représentations actuelles de la femme, notammentau prisme du regard masculin... De nombreuses œuvres de l’exposition du MBA témoignent de ce regard stéréotypéposé sur la femme orientale. Ces visions sont fréquemment le fait d’artistes n’ayant jamais fait le voyage jusqu’à cesterres lointaines. Ils se nourrissent alors de références picturales. En 1835, Alexandre Colin, influencé par Delacroixréalise dans son atelier une Orientale dont le propos consiste à offrir au public l’exotisme et l’interdit qu’il attend alorsd’une telle production. En 1842, Ingres produit L’odalisque à l’esclave. Il s’est saisi dès le début du siècle des sujetsorientaux, sans se rendre sur place, et propose dans de nombreuses œuvres l’image d’une nudité féminine sensuelleet offerte, produit d’un Orient exclusivement vu de son atelier, pétri de détails exotiques tout autant que de fantasme.Jean-Léon Gérôme, que l’on rencontrera aussi au musée Magnin aux côtés de Bartholdi, est un des principauxreprésentants de l’expression orientaliste. Ayant à l’inverse des précédents longuement séjourné en Orient, il se tourne lui aussi vers la représentation du corps nu féminin, notamment dans Le marché d’esclaves de 1869 où s’exprime là encore une séduction érotique destinée au public occidental.
Collection
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19e siècle |
Titre
Regards sur l’Orient au XIXe siècle, interrogations pour notre temps
Titre Alternatif
Autour de deux expositions dijonnaises programmées cet hiver
Date
17/02/2020
Langue
Sujet
Orientalisme
Format
Droits
Non libre de droits