À travers et par la Méditerranée : regards sur Albert Camus1
Description
[Résumé]
Quelque peu malgré lui, Albert Camus élabora, plus qu’un mythe de la Méditerranée, un mythe de l’homme contemporain, symboliquement alimenté par la terre méditerranéenne : le mythe d’Euphorion. Ses différentes créations littéraires précisent peu à peu les attributs et les actions de cet antihéros, mais déjà avec les premiers écrits, l’idée persistante d’harmonie (de mesure) se développe à partir des images que l’auteur lui-même considérait méditerranéennes. Ces images se cristallisent progressivement en constellations dynamiques dont la force se trouve davantage dans leurs aspects nocturnes et terrestres, voire « organiques », que dans des idéaux solaires et épurés. À partir de cette réalité rêvée, l’imaginaire camusien révèle que cette terre, tel un espace privilégié, est celle où l’équilibre entre l’exil et le royaume deviendrait finalement réalisable, sous les bons auspices de Némésis. À travers l’étude des paysages méditerranéens, constamment présents dans l’œuvre camusienne, et qui dans un premier temps semblent être les mêmes sur toutes les rives, nous pouvons aussi constater que chaque pays vécu (généralement visité) lui apporte une dimension méditerranéenne particulière... qui alimente, à son tour, sa propre Méditerranée rêvée.
[Extrait]
Rappelons encore que la méditerranéité d’Albert Camus s’alimente aussi de son ascendance maternelle minorquine ; et, par la suite, ses voyages dans différents pays de la Méditerranée, ainsi que ses connaissances sur la culture méditerranéenne, sont de toute évidence à l’origine de ses écrits aussi bien conceptuels que lyriques. Pour évoquer la réelle prégnance méditerranéenne chez Camus, nous pouvons, dans un premier temps, considérer l’élaboration de son image dans ses œuvres de fiction (« Si tu veux être philosophe, écris des roman », inscrit Camus dans ses Carnets, alors qu’il s’essaie avec La mort heureuse), et dans un deuxième temps nous verrons comment la Méditerranée est dépeinte dans les différents pays que l’écrivain évoque dans ses œuvres. Les romans, et pour Camus les pièces de théâtre aussi, sont les espaces littéraires privilégiés de cette méditerranéité. À partir des constellations symboliques qui y sont mises en place, il est possible d’apprécier le poids, même conceptuel, que certains éléments méditerranéens ont acquis. Ainsi, même lorsque la Méditerranée n’est pas présente de façon patente dans une œuvre de fiction ou dans une autre, on peut facilement la retrouver en creux, par les caractéristiques qui en sont évoquées. C’est le cas pour Le Malentendu, ou encore pour Les Justes, et même pour La Chute. En revanche, les essais rédigés par Camus traitent très souvent de la Méditerranée, et de manière très explicite ; surtout ses références à la mythologie grecque, voire ses repères mythologiques, renvoient presque exclusivement à cette culture classique qui pour Camus représente la Méditerranée, de la même manière qu’il assure, dans l’essai « Prométhée aux enfers », que « les mythes attendent que nous les incarnions. ».
Titre
À travers et par la Méditerranée : regards sur Albert Camus1
Éditeur
"Synergies" (Revue)
Date
22/03/2011
Langue
Format
n°4, p. 193-200
Source
Droits
Non libre de droits