L'«orientalisme» et le paysage méditerranéen
Description
[Résumé]
L’«orientalisme», dans l’approche du paysage méditerranéen, sert aussi bien de mise en valeur d’un «exotisme» que de masque dans l’approche de l’Autre.
[Abstract]
«Orientalist» approaches of the Mediterranean landscape are used to give importance to exoticism as well as toconceal the approach of «Otherness».
[Extrait]
"Partir vers l’Orient, c’est aller à la découverte d’une Méditerranée longtemps coupée de la culture classique, Méditerranée présente très tôt, comme dans Les Perses d’Eschyle, par la pré-monition d’un Autre menaçant dans un Ailleurs plein d'’embûches. Le paysage de cette partie de la Méditerranée estmoins chanté que les rives de l’«heureuse Italie», les minus-cules paradis de la mer Égée, voire les côtes mythifiées de la Grèce — laquelle, sous domination turque, a fait un moment partie de l’Orient. Le véritable Orient qui nourrit l’imaginaire commence plus loin. «Aller en Orient, écrit Maxime du Camp,c’était quelque chose à cette époque. On croyait encore à la peste, à l’intolérance du grand seigneur et au pal des janissaires; pour ma part, je ne croyais à rien qu’au soleil, aux caravanes et aux paysages». Très vite, un style de vie, réel ou idéal,se surimpose au compte rendu de paysage très partiel, très sporadique: tout se passe comme si, plus qu’ailleurs, le paysage del’«orientalisme» avait du mal à être «vu». On trouve un pittoresque parfois surdéterminé par un investissement de rêves,des images composites qui deviendront facilement des «clichés». Et des points forts, lieux de pèlerinage, autour desquels l ’histoire se fait et se défait. Que devient le paysage? La Turquie: un cadre pour l’histoire, un décor Depuis les «turqueries des «Mammamouchi» de Molière, le Grand Turc, c’est le sérail, le harem, le «pal des janissaires» et Constantinople la vraie porte de l’Orient. Chateaubriand avaiit vu une Constantinople silencieuse, Nerval un lieu idéal pour son «fantastique quotidien»; Pierre Loti, le plus turcophile des«orientalistes», un panorama éblouissant dans lequel peut se dérouler le rêve d’une vie heureuse, libérée des contraintes dela morale occidentale. Aziyadé, roman à succès, met en scène cette osmose typiquement romantique et post-romantique entre une femme et un paysage: passion silencieuse, l’idylle entre Pierre Loti et la jeune Aziyadé rejaillit sur tout le paysage qui l’environne et sur ses caractéristiques. Paysage très«féminisé», plein du stéréotype des «langueurs orientales»,d’une volupté qui se cristallise dans les parfums, les couleurs fortes, la lumière qui «inonde tout». Tantôt cependant le paysage frappe par sa précision: «... les cyprès dessinaient sur la montagne des larmes noires, les platanes des masses obscures; de loin en loin, des vieilles bornes séculaires marquaient la place oubliée de quelques derviches autrefois...», bien que les marques du temps — «bornes»,«derviches» — se mêlent inextricablement à celles de l’espace. Tantôt le paysage est immédiatement transformé en «scène de genre»: «... s’asseoir au soleil et s’étourdir doucement à la fumée d’un narghilé; [...] être soi-même une partie de ce tableau plein de mouvement et de lumière». Scène dans laquelle le protagoniste se fait partie prenante d’un paysage peu décrit mais évoqué à grand renfort d’imagerie sensuelle."
Collection
Titre
L'«orientalisme» et le paysage méditerranéen
Créateur
Éditeur
Revue Mappemonde
Date
1992, n°1
Langue
Source
Researchgate.net
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