Le paysage méditerranéen dans la poésie de Mohammed Khair-Eddine
Description
[Résumé]
À travers ses différents recueils, le poète marocain Mohammed Khair-Eddine (1941-1995) représente le paysage méditerranéen en l’investissant d’une vision originale. La mise à contribution de l’imaginaire païen lui permet de transcender le réel contemporain désenchanté et frustrant. Influencé, en partie, par la poésie surréaliste de la première heure, l’auteur de Soleil arachnide cherche à installer une courroie de transmission entre sa subjectivité déchaînée et les paysages méditerranéens rêvés et fantasmés. Pourtant, l’ensemble de son expérience poétique, donnant lieu à un style organique, tend à inverser la symbolique solaire de ces paysages en les recouvrant d’une mythologie personnelle proprement ténébreuse et en les chargeant des signes de la révolte et du refus.
[Extrait]
"L’œuvre poétique de Mohammed Khair-Eddine est la fille légitime de la poésie surréaliste des années 20 et 30 du XXe siècle. Son recours à une écriture qui met à contribution aussi bien les registres réaliste que merveilleux l’inscrit de plain-pied dans une imagerie caractérisée. Encore faut-il préciser que sa poésie se veut dégagée du lyrisme romantique et qu’elle s’efforce de conjuguer les données respectives d’une subjectivité béante et d’un réel échancré. Aussi le point de suture de ces deux composantes de l’expérience poétique ne pouvait-il passer, à l’instar de la poésie surréaliste, que par la notion de lieu. Force est de constater que « la matière-émotion » qui sous-tend, selon Michel Collot, toute expérience poétique du monde constitue l’horizon même de l’écriture de Mohammed Khair-Eddine. Ses différents recueils, depuis Soleil arachnide jusqu’aux poèmes posthumes publiés dans Quasar, en passant par Ce Maroc, Résurrection des fleurs sauvages et Mémorial, se développent autour d’un certain nombre de paysages et de sites, tantôt réels, tantôt fantasmés, ayant un rapport direct ou indirect à ce qu’il baptise métaphoriquement « le placenta du monde » (QU, 837).
Alors que la plupart de ses romans et récits ont pour ancrage spatial le Sud du Maroc, surtout sa région natale (Tafraout) et la ville où il a passé ses années de jeunesse (Agadir), son souffle poétique est plus porté vers une inspiration méditerranéenne8. Le réalisme magique qui a pétri son imaginaire poétique tend à se cristalliser singulièrement autour des paysages aquatiques et littoraux. À l’image de son écriture qui parcourt les codes génériques et discursifs en vue d’installer un nouvel ordre scriptural, la géographie inhérente à son œuvre poétique est imprécise, inconsistante et sans contours nets. Au demeurant, Mohammed Khair-Eddine dynamite, en connaissance de cause, la notion de lieu. La confusion géographique dans laquelle il situe ses poèmes fait perdre à la parole poétique son ancrage réaliste et la situe dans une imagerie fantaisiste qui favorise tout à la fois la rhétorique de l’écriture automatique et la trame imagée du récit de rêve".
Contenus liés
Khaïr-Eddine, Mohammed (1941-1995) |
Maroc |
Une femme Aleramo, Sibilla (1876-1960) |
SOLEIL |
Titre
Le paysage méditerranéen dans la poésie de Mohammed Khair-Eddine
Titre Alternatif
in Paysages méditerranéens – Correspondances poétiques
Éditeur
Revue Babel, Littératures plurielles
Date
2014
Langue
Format
N° 30, p. 199-216
Identifiant
https://doi.org/10.4000/babel.3947
Source
Lire l'article en ligne sur OpenEdition consulté le 10 février 2023)
Droits
Non libre de droits