Description

S’interrogeant sur eux-mêmes, les personnages de Comme ci (ou comme ça) ont fait la même découverte que Moscarda : dans le miroir tendu par autrui ils ne se sont pas reconnus. Si Delia s’est sentie dépersonnalisée par le regard de Doro et de Francesco, ceux-ci ont refusé l’image d’eux-mêmes que Diego leur proposait, tout comme Michele Rocca n’a pas voulu du rôle qu’on lui prêtait. C’est l’existence même du moi qui s’est trouvée ainsi mise en question par le « Qui suis-je ? » de Diego. Échappant à toute prise, il s’est en effet dérobé à toute investigation au point que le spectateur a pu se demander si le moi n’était pas, comme le veut Valéry, « qu’une notation commode, aussi vide que le verbe “être” - tous les deux d’autant plus commodes qu’ils sont vides » ?
En vérité, le moi du personnage pirandellien ne se définit pas par son absence mais par sa contingence et sa facticité. N’étant jamais lui-même mais toujours quelqu’un d’autre, il se trouve privé d’identité. C’est pourquoi il est, par excellence, l’Étranger. C’est la condition de Moscarda : « Ne pouvant me voir vivre, je restais étranger à moi-même, c’est-à-dire quelqu’un que les autres pouvaient voir et connaître, chacun à sa façon, et moi non. » Il y avait bien cet autre qu’il voyait dans son miroir, mais cet autre, qui était-il ? : « Il n’était rien. Personne. Un pauvre corps mortifié attendant que quelqu’un le prît. » Cette attente, qui a la forme d’un espoir, n’est jamais déçue, mais dès qu’elle est comblée, c’est le drame, car celui qui s’empare de ce corps sans nom en fait aussitôt un personnage…

Titre

Le jeu des masques

Titre Alternatif

in Introduction au théâtre de Luigi Pirandello

Créateur

Éditeur

Presses Universitaires de France, Collection Écrivains

Date

1997

Langue

Format

pages 135 -154

Source

CAIRN.INFO

Droits

Non libre de droits