La tétralogie des mythes

Description

Dans une de ses dernières conférences tenues en Amérique, Pirandello a affirmé qu’il n’avait jamais « assumé aucune responsabilité philosophique » et qu’il avait toujours voulu « faire de l’art, selon ses possibilités ». Nous pouvons, croyons-nous, lui en donner acte. Son théâtre n’est assurément pas un théâtre philosophique si l’on entend par là une œuvre qui repose sur un système cohérent de pensée et expose une thèse sous forme de raisons démonstratives. Que, d’une part, l’idéalisme allemand, Schopenhauer en particulier, ait fourni les soubassements théoriques de la vision du monde de notre auteur et que, d’autre part, nombre de personnages puissent apparaître comme des logiciens dans la mesure où ils ne se contentent pas de vivre mais se regardent vivre en réfléchissant sur le sens de leur existence, c’est ce que nul ne songerait à nier. Cela ne suffit pas, cependant, à faire du théâtre de notre auteur un drame à idées. On ne saurait lui reprocher de donner à réfléchir en nous montrant des personnages qui non seulement crient leur souffrance mais raisonnent sur leur souffrance en nous obligeant à prendre parti, à discuter avec eux, à nous sentir concernés. Passion et expression sont intimement liées parce que s’il est une vérité que Pirandello a retenue du Monde comme volonté et comme représentation, c’est bien que « la souffrance est le fond de toute vie ». C’est pourquoi nous avons affaire, non à des marionnettes métaphysiques dont il tirerait les ficelles, mais à des êtres de chair que la douleur contraint.