Le street art à Marseille. Entre communication urbaine, institutionnalisation et instrumentalisation
Description
[Résumé]
Nous analysons, à Marseille, les différentes stratégies urbaines de communication et de valorisation territoriales liées au street art et à l’image qu’il véhicule, en fonction du rôle différencié que les acteurs de la ville (politique, associatif, privé) lui confèrent. Pour ce faire, nous montrons comment les fresques créées dans le quartier du Panier permettent de créer un paysage urbain coloré, et insolite pour les touristes de croisière, tandis qu'elles enrichissent l'image de quartier « créatif » du cours Julien, et qu'elles transforment un projet décrié d'autoroute lourd de nuisances en galerie d'art à ciel ouvert. Dans ces trois terrains, nous montrons en contrepoint que, si l’institutionnalisation du street art est pratiquée de multiples manières, elle provoque des oppositions marquées et questionne les fondamentaux de cette pratique à l’origine vandale.
[Abstract]
In this article, we analyze, in Marseille, the different urban strategies of communication and territorial development linked to street art and the image it conveys, according to the differentiated role that the actors of the city (political, associative, private) give it. To do this, we show how street art created in the Panier district make it possible to create a colorful urban landscape, unusual for cruise tourists, while street art develops the image of the "creative" district of the Cours Julien, and transforms a maligned highway project with nuisances into an open-air art gallery. In these three fields, we also show that, if the institutionalization of street art is practiced in multiple ways, it provokes marked social opposition and questions the fundamentals of this practice which was originally vandal.
[Extrait]
Dans cet article, nous posons le street art (SA) comme une forme d’art urbain protéiforme et éphémère qui se pratique dans les espaces publics de manière légale ou illégale. Il peut être appréhendé en trois grands sous-ensembles : le premier est politique et s’inscrit comme un moyen d’affirmation et d’opposition au système dominant, pratiqué de manière illégale (Baudrillard et al., 1974 ; Fraenkel, 2007 ; Ginhoux, 2015) ; le second est issu de la culture hip‑hop et intègre les notions de graffiti et de writing, au sens de McAuliffe (2012), il se pratique historiquement de manière vandale dans les espaces publics ; le troisième est du ressort de la fresque décorative autorisée par les collectivités ou les promoteurs, et intégrée à l’espace public. Le développement de cette dernière manière de pratiquer a profondément questionné les fondements originels du SA.
[...]
Dans cet article, nous souhaitons analyser, à Marseille, les différentes stratégies urbaines de communication et de valorisation territoriales liées au street art et à l’image qu’il véhicule, en fonction du rôle différencié que les acteurs de la ville (politique, associatif, privé) vont lui donner. Pour ce faire nous poserons Marseille comme une ville où le street art est pratiqué depuis longtemps, puis nous chercherons à montrer comment les fresques créées dans le quartier du Panier permettent de créer un paysage urbain coloré, et insolite pour les touristes de croisière, tandis qu'elles enrichissent l'image de quartier « créatif » du cours Julien, et qu'elles transforment un projet décrié d'autoroute lourd de nuisances, en galerie d'art à ciel ouvert. Le choix de ces trois terrains marseillais s’explique autant par leur localisation, que par la manière dont y est pratiqué le SA et leurs histoires socio-urbaines particulières : la L2 est une voie de circulation autoroutière avec beaucoup de passage, et donc de possibilité d’être vu, qui rappelle la localisation classique du street art le long des voies ferrées en même temps qu’il interroge sur les motivations premières des mécènes et des pouvoirs publics en matière de SA, et celles des artistes graffeurs traditionnellement plutôt réticents à réaliser des fresques décoratives sur commande ; le quartier du Panier est le lieu originel de création de la ville de Marseille, il se situe à proximité de l’opération d’aménagement du territoire d’intérêt national Euroméditerranée et est particulièrement marqué par l’airbnbisation urbaine (Grondeau, 2022) ce qui crée, en théorie, des conditions favorables au développement d’un SA politique et contestataire ; le cours Julien, quartier historique festif et militant, est devenu avec le temps une véritable galerie d’art urbain informel, vectrice d’attractivité touristique, à l’instar de ce qu’on a pu déjà étudier par ailleurs à Lisbonne notamment avec la Galeria d’Arte Urbana (Grondeau, Pondaven, 2018).
Table des matières
1. Marseille, ville de street art
2. Le street art au cours Julien : entre affirmation identitaire, valorisation touristique, et conflits d’usage
2.1. Le street art, une pratique affirmant l’identité du cours Julien
2.2 Le street art : source de développement local ou conflit d’usage ?
3. Le street art au Panier : vecteur d’attractivité et de conflits sociaux
4. Financement privé, communication, intégration sociale et aseptisation du street art : le cas de la L2
Conclusion
Collection
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Titre
Le street art à Marseille. Entre communication urbaine, institutionnalisation et instrumentalisation
Titre Alternatif
in Revue Méditerranée, Cultures, patrimoines, représentations
Street art in Marseille: between Urban Communication, Institutionalization and Instrumentalization
Contributeur
Éditeur
Revue Méditerranée 2023
Date
mis en ligne le 18 avril 2023
Langue
Place
Format
Article électronique [En ligne] mis en ligne le 18 avril 2023,
Source
Lire sur OpenEdition (consulté le 09 mai 2023)
Droits
Non libre de droits