Description

Les textes réunis dans ce dossier thématique de Via@ sur les « Imaginaires touristiques » cherchent à explorer un ensemble de questions portant sur le rôle, le fonctionnement et l’impact des imaginaires sur les lieux, les acteurs et les pratiques touristiques.
Issus du colloque « Tourism Imaginaries/Imaginaires Touristiques »1 organisé en février 2011 à Berkeley par l’EIREST2 et le TSWG3 sous la responsabilité scientifique de Nelson Graburn (anthropologie) et de Maria Gravari-Barbas (géographie), ils visent à approfondir la notion des imaginaires touristiques et à proposer des méthodologies et des connaissances susceptibles de les appréhender globalement.
[Extrait]
Qu’est-ce que l’imaginaire touristique ?
Les imaginaires touristiques appellent des définitions multidimensionnelles prenant en compte l’ensemble de la chaîne de la production touristique. Si leurs définitions se réfèrent tout d’abord à un imaginaire de lieux géographiques dans lesquels se déroule l’activité touristique, ce serait une erreur de négliger les imaginaires liés aux pratiques ou aux acteurs touristiques.
Les imaginaires touristiques représentent une partie spécifique de la vision du Monde d’individus ou de groupes sociaux, concernant des lieux autres que ceux de leur résidence principale ou se référant à des contextes où pourraient se dérouler certains types d’activités de loisir. Très souvent, ces imaginaires d’autres lieux et d’autres peuples sont profondément ancrés, découlant de premières et intimes expériences au sein de la famille ou de visions du Monde, des peuples et des lieux, enseignés dès l’école élémentaire (Graburn 2000).
Les imaginaires peuvent donc être à la fois idiosyncratiques ou familiaux, partagés culturellement. Ils peuvent être inculqués à un aussi jeune âge qu’ils fassent partie des attitudes inconscientes que Bourdieu appelle habitus (Bourdieu 1984).
Un imaginaire de lieux
Les imaginaires touristiques peuvent être définis comme des imaginaires spatiaux qui se réfèrent à la virtualité en puissance d’un lieu en tant que destination touristique. Selon Bachelard, ils représentent une façon d’entrer en relation avec l’espace et la matière qui génère du sens, sans pour autant déterminer strictement des comportements et des configurations (Bachelard, 1957, cité in Debarbieux, 2003).
Ils permettent aux individus et aux groupes de se représenter un lieu en tant que destination touristique appréhendable ; ils créent le désir, ils rendent un lieu attractif, ils contribuent à concrétiser un projet de voyage (à la fois en intervenant dans la sélection préalable du lieu visité et sur les pratiques a priori associées au voyage entrepris), ils réduisent la distance avec le lieu touristique, ils apprivoisent son caractère exotique (Staszak, 2008), en même temps qu’ils le construisent. Ils interviennent non seulement au moment du choix de la destination, mais également sur place, orientant, déterminant ou empêchant certaines pratiques. S’ils sont négatifs, ils contribuent à détourner de certaines destinations.
Les imaginaires touristiques facilitent ainsi la transition entre l’ici et l’ailleurs, le proche et l’exotique, le connu et l’inconnu. Ils interviennent de manière décisive dans le projet de voyage. Sans l’imaginaire touristique qui sélectionne parmi la gamme des multiples destinations possibles la plus désirée, la plus séduisante ou la plus enchanteresse, il ne peut y avoir de projet touristique.
Le rôle des imaginaires touristiques est ainsi incontournable, puisqu’ils permettent aux individus concernés d’aborder le lieu touristique dans ses différentes dimensions, sans qu’ils y soient matériellement et symboliquement perdus.

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