Intérieur au violon
Description
Matisse rêvait d' « un art d’équilibre, de pureté, de tranquillité, sans sujet inquiétant ou préoccupant, qui soit [...] un lénifiant, un calmant cérébral ». Cette sérénité, il la trouve d'abord dans les paysages méditerranéens.
Mais, peu à peu, le plein air laisse place à des scènes d’intérieur, baignées d’une lumière assourdie, filtrée par les persiennes. Son installation à Nice coïncide avec ce glissement vers une intériorité revendiquée en ces termes : « Si j’ai pu réunir dans mon tableau ce qui est à l’extérieur, par exemple la mer, et à l’intérieur, c’est que l’atmosphère du paysage et celle de la chambre ne font qu’un… Je n’ai pas à rapprocher l’intérieur et l’extérieur, les deux sont réunis dans ma sensation ». Déplaçant sans cesse tables, rideaux et fauteuils, Matisse réagence l’ameublement de ses chambres d’hôtel ou de ses appartements pour composer de subtiles variations autour de ce motif familier. Dénuées de tout érotisme, les figures féminines, nonchalamment étendues dans l’atmosphère émolliente d’un début d’après-midi, s’y dissolvent dans de subtiles harmonies colorées.
Matisse est un des peintres qui, au début du XX° siècle, ont modifié notre conception de la peinture et de l’art en général. « intérieur au violon» de 1918-21 est une de ses œuvres importantes de l’après-guerre, contemporaine de ce qu’on a appelé le « retour à l’ordre ». Son titre met en évidence les deux sujets importants du tableau. Matisse affirme ici son goût pour l’opposition entre les deux mondes, l’intérieur et l’extérieur, mais aussi pour la simplification décorative, et pour le violon et la musique en général. Les couleurs frappent dès le premier regard, avec l’opposition entre les bleux et les rouge vermillon et le orange. Ces associations proches des complémentaires attirent notre regard vers les thèmes essentiels de son oeuvre, le violon et la fenêtre. Depuis la 1ère exposition fauve en 1905, dont Matisse apparaît comme le peintre le plus important, la couleur ne cherche plus à imiter le réel, mais à construire le tableau en fonction des contrastes. A la renaissance, Alberti définit la peinture comme une « fenêtre ouverte sur le monde ». L’art a une relation mimétique avec le réel. Comme souvent, Matisse peint le thème de la fenêtre comme s’il s’agissait d’un questionnement. Matisse se situe entre la tradition byzantine dans laquelle le divin était omniprésent et la tradition moderne (après la renaissance) dans laquelle c’est le monde réel qui est important (pour Alberti, le tableau est une fenêtre ouverte sur le monde). La clarté de l’horizon semble moins profonde dans le cas de Matisse.
L’intérieur est plus proche de l’atmosphère symboliste (Moreau son prof aux BA de Paris). Faire référence à Huysmans : dans à rebours, le personnage des Esseintes se retire hors du monde dans un intérieur peuplé d‘œuvres symbolistes. Il recrée un univers qu‘il veut parfait. « l’araignée » de Redon est une des oeuvres qu’il expose dans son appartement.
L’extérieur fait référence à Monet (la lumière et le soleil) qui l’avait beaucoup influencé avant le fauvisme.
La fenêtre centrale de ce tableau témoigne du conflit entre la subjectivité et l’objectivité, entre le moi et le monde. Ici, le conflit semble se résoudre dans un équilibre entre les deux côtés de chacun.
Source Hugues Absil (consulté le 13 juin 2023)
Collection
Contenus liés
Matisse, Henri (1869-1954) |
20e siècle |
France |
Nice (France) |
Titre
Intérieur au violon
Créateur
Éditeur
Statens Museum for Kunstc Copenhague, Danemark,
Date
1917-1918
Format
Huile sur toile, 116 × 89 cm
Identifiant
No d’inventaire: KMSr83
Droits
Non libre de droits