Décrypter le regard national : voyageuses anglaises et françaises en Algérie au XIXe siècle
Description
[Extrait]
En 1832, une jeune femme française, Véronique Allix (1804-1882), arrive seule en Algérie, fuyant un mari violent et laissant sa fille auprès de ses parents en Touraine. Quinze ans plus tard, elle fait parler d’elle à Alger puisqu’elle a réussi, en dépit d’obstacles considérables, à ouvrir la première école pour jeunes filles musulmanes et à la faire subventionner par le gouvernement colonial. Son école « arabe-française » fonctionne ensuite jusqu’en 1861 conjointement avec un ouvroir où ses jeunes élèves s’initient à la broderie. En 1861, les autorités coloniales cessent de financer l’école mais soutiennent l’ouvroir par des bourses d’apprentissage, soutien qui continue jusqu’en 1867. L’ouvroir continue néanmoins d’exister, certainement en partie grâce aux bénéfices réalisés par la vente des produits fabriqués. Mme Allix, devenue Mme Luce par un deuxième mariage, quitte l’Algérie au début des années 1870 laissant son ouvroir-magasin aux mains de sa petite fille Henriette Benaben. Celle-ci poursuivra l’œuvre « industrielle » de sa grand-mère jusqu’à sa mort en 1915. Elles ne sont pas des voyageuses, ni l’une ni l’autre, mais leur œuvre et leurs personnes attireront l’attention de voyageuses pendant près d’un demi-siècle.
Dans sa quatrième édition du Handbook for Travellers in Algeria and Tunis (1891), le guide Murray dirige les pas des touristes anglais vers le magasin de broderies de Mme Benaben et présente aux lecteurs la personne de Mme Luce, responsable selon lui de la survie des broderies orientales dont raffolent les Anglaises :
De tous les établissements qui vendent ou fabriquent des objets arabes, aucun n’est plus intéressant à visiter que celui de Mme Benaben, petite fille et successeur de Mme Luce, dans la rue Bruce, presque en face de la Cathédrale. Cette dernière a dédié sa vie entière à deux objets dignes de reconnaissance : la survie de ces broderies exquises pour laquelle Alger est si reconnu et qui sans elles auraient disparu ; et l’effort d’enseigner aux femmes arabes le moyen de gagner leur vie honorablement [...] Ce si bon travail féminin est digne des louanges et des encouragements les plus forts. [Sir R. Lambert Playfair, Handbook for Travellers in Algeria and Tunis, 4e éd., Londres, John Murray, 1891, p. 103.
Table des matières
1. Voyages de découverte et de loisir : les Anglaises en Algérie
Conditionner le regard porté sur l’autre
Le genre du regard
2 Le regard colonial : les Françaises en Algérie
Le poids des grilles de lectures de l’administration coloniale
Les voyageuses françaises et l’œuvre de Mme Luce
3 Conclusion
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VOYAGE |
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LITTÉRATURE MÉDITERRANÉENNE |
Titre
Décrypter le regard national : voyageuses anglaises et françaises en Algérie au XIXe siècle
Titre Alternatif
in Le voyage au féminin. Perspectives historiques et littéraires (xviiie-xxe siècles)
Créateur
Contributeur
Éditeur
Presses universitaires de Strasbourg
Date
2008
Langue
Source
Lire sur books.openedition.org (consulté le 5 juillet 2023)
Droits
Non libre de droits