Découverte picturale de l’Algérie : des artistes militaires au service de la conquête des territoires
Description
[Extrait]
Dans l’imposante Iconographie… de Gabriel Esquer (1876-1961) [Archiviste et bibliothécaire à Alger, Gabriel Esquer est l’auteur de l’Iconographie historique de l’Algérie depuis le xvie siècle jusqu’à 1871, Paris, Plon, 3 vol., 1929 ; réédition sous le titre : Histoire de l’Algérie en images, Paris, Bibliothèque des Introuvables, 2008.], on ne perçoit que relativement peu d’images de l’Algérie produites entre les xvie et xviie siècles, images d’ailleurs le plus souvent fantasmées d’un espace où les mouvements de personnes et d’objets, de part et d’autre de la Méditerranée, n’ont pourtant jamais cessé. La majorité de ces représentations graphiques de l’espace précolonial ne révèle que l’immense façade maritime du pays, l’intérieur des terres du Maghreb n’étant quasiment pas figuré par les contemporains. C’est à partir du xviie siècle que des observateurs européens réalisent des vues précises d’Alger surtout, et de quelques autres villes côtières comme Oran ou Djidjelli. De premiers travaux de reconnaissance visuelle et topographique de lieux stratégiques sont exécutés dans le cadre des expéditions européennes contre les foyers de piraterie en Méditerranée. À côté de ces documents de plus en plus exacts et indispensables au pouvoir, on retrouve par ailleurs des images inventées mettant en scène des corsaires fameux ou décrivant la chiourme d’une galère, dévoilant les portraits et les costumes d’hommes ou de femmes autochtones. Ces fantasmagories, reproduites de génération en génération, sont encore très vives au moment des premières expériences et perceptions des militaires en 1830. De telles images se superposent aux nombreux récits de chrétiens anciens captifs à Alger, alors que les témoignages en sens inverse sont plus rares, malgré une forte présence des musulmans en terre chrétienne. L’histoire des représentations de l’Algérie ne débute donc pas subitement en 1830. Aussi doit-on évoquer cette sorte d’amnésie qui frappe tous les rapports intenses et anciens qui ont eu lieu entre les populations des deux rives de la Méditerranée [Abderahmane Bouchene, Jean-Pierre Peyroulou, Ouanassa Siari-Tengour, Sylvie Thénault (dir.), Histoire de l’Algérie à la période coloniale, Paris / Alger, La Découverte / Barzakh, 2012, p. 142-149.].
[...] Ce fonds d’images est une ressource pour les officiers. Ils suivent ainsi les transformations des paysages et des mœurs, déterminent des espaces encore inconnus. Jusqu’à sa mort en 1858, le général Pelet se charge de la gestion de ce fonds visuel. Il participe également à la collection du musée de Versailles et collabore étroitement avec Louis-Philippe, les princes, Alphonse de Cailleux (1788-1876) et H. Vernet. La correspondance d’A. Genêt transmet depuis l’Algérie ses perceptions multiples ; le peintre militaire y raconte l’attrait sensible que lui procurent ces découvertes picturales. Ses lettres et ses croquis sont comme le moteur d’une pensée artistique autonome. A. Genêt apparaît à la fois comme un instrument du pouvoir militaire qui est à la recherche d’une visualité de l’Algérie, mais également comme une subjectivité fascinée par les couleurs et les motifs de l’Orient.
Table des matières
1. Entre topographie et paysage pittoresque : modalités d’une enquête visuelle sur le terrain
2. Des peintres militaires au service du commanditaire princier
3. Théodore Leblanc (1800-1837) et ses images de l’espace méditerranéen en guerre
4. Produire une « visualité de l’espace militaire
Collection
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18e siècle |
19e siècle |
Algérie |
Titre
Découverte picturale de l’Algérie : des artistes militaires au service de la conquête des territoires
Titre Alternatif
in L'invention des midis
Créateur
Contributeur
Éditeur
Presses universitaires de Strasbourg, Collection Sciences d el'histoire
Date
2015
19/09/2019 (publication numérique)
Langue
Format
pp. 77-90, 218 pages
Source
Openedition books (consulté le 7 mai 20224)
Droits
Non libre de droits