Istanbul, une métropole méditerranéenne ? Critique d’un lieu commun tenace
Description
[Résumé]
L’intégration d’Istanbul à la Méditerranée est ici interrogée à la lumière des flux migratoires, commerciaux et culturels, en faisant table rase des images convenues, qui contribuent trop souvent à mal appréhender la véritable aire de rayonnement, actuelle, d’Istanbul. En effet, si par le passé Istanbul était franchement tourné vers la Méditerranée, de nos jours, cette orientation est moins évidente et mérite en tout cas d’être discutée. La seule Méditerranée qui existe pour Istanbul est en fait la Méditerranée lointaine, nord-occidentale (c’est-à-dire européenne). Au terme de notre examen, on découvre en fait une métropole « hémiplégique » avec une face active vers la mer Noire et une face encore peu active vers la Méditerranée surtout la Méditerranée proche. Un des enjeux des années à venir pour la principale métropole de la Turquie devient dès lors son réancrage à la Méditerranée orientale et méridionale.
[Abstract]
This paper focuses on the concrete ties-particularly in terms of migrations and commercial relations-between Istanbul and the Mediterranean, so as to criticize the common idea of an obvious Istanbul’s belonging to the Mediterranean. In fact, the actual metropolisation process tends to polarize Istanbul rather on the Back See and the far Mediterranean, than to the near Mediterranean (near, both in cultural and geographical aspects). Mediterranean doesn’t exist at all for Istanbul, as a global and integrated entity, making sense in itself. The only Mediterranean seems to be European Mediterranean. In this regard, one of the main purposes for Istanbul in the next years could be its urgent reintegration in the near Mediterranean.
[Extrait]
L’appartenance d’Istanbul à la Méditerranée est souvent présentée comme une évidence indiscutable1, alors même qu’en fait, en dépit d’une histoire indéniablement méditerranéenne, les rapports actuels d’Istanbul au « monde méditerranéen » -entendu ici dans son acceptation la plus simple : celle de l’ensemble des pays riverains du bassin méditerranéen- ne sont pas aussi frappants et intenses, même si l’on annexe à la Méditerranée la mer Egée. Rappelons en effet que pour les Turcs, la Méditerranée est désignée comme « la mer Blanche (Akdenitz) ou « mer du sud » ; autrement dit, il s’agit seulement pour les Turcs de la mer qui baigne le flanc sud de l’Anatolie .
La Méditerranée du point de vue turc a donc une extension limitée : elle doit être distinguée de la mer Egée, d’une part, et de la mer de Marmara, d’autre part. Ainsi les manuels turcs de géographie décrivent-ils une côte méditerranéenne de 1.577 km –sur les 8.333 km de côtes que compte le pays (Doianay, 1997, p. 100)-., qui s’étire à l’ouest du fleuve Dalaman, au droit de Rhodes, à la frontière syrienne, à l’Est. Dans cette perspective, Izmir (Smyrne), d’abord égéenne, n’est guère plus méditerranéenne qu’Istanbul.
Nous voudrions montrer que l’aire de rayonnement d’Istanbul n’est pas principalement méditerranéenne, n’en déplaise aux victimes ou vecteurs d’idées préconçues, inlassablement transmises et reprises. On s’attachera donc à prendre en compte différents critères pour mesurer en quoi les liens d’Istanbul à la Méditerranée, aujourd’hui, ne sont pas aussi massifs qu’on peut communément le prétendre.
Table des matières
Collection
Contenus liés
Istanbul (Turquie) |
Turquie |
Mer Méditerranée |
MEDITERRANEE |
20e siècle |
Titre
Istanbul, une métropole méditerranéenne ? Critique d’un lieu commun tenace
Titre Alternatif
in Revue "Cahiers de la Méditerranée", Les enjeux de la métropolisation en Méditerranée,N° 64 | 2002
Éditeur
"Cahiers de la Méditerranée", Centre de la Méditerranée Moderne et Contemporaine, Université Côte d'Azur
Date
2002, N° 64
Langue
Format
pp. 167-198
Identifiant
https://doi.org/10.4000/cdlm.76
Source
journals.openedition.org (mis en ligne le 15 juin 2004, consulté le 24 avril 2025)
Droits
Non libre de droits