Description

"Quand il tourne avec Boris Kaufman les premiers plans d’À propos de Nice, Jean Vigo se révèle découvreur, défricheur, célébrant le cinéma comme un art forain. De tentatives en tentatives, ce premier opus de l’œuvre prendra forme librement jusqu’à devenir à la fois un poème filmé, un cri de colère anticonformiste et politique, qui dépassera par sa puissance visuelle bien des films dit avant-gardistes de la même époque. Philippe Bonnaves, dans une analyse approfondie, dévoile quelques motifs et raconte la genèse d’un des plus beaux documentaires cinématographiques. 
 
Sous-titré par Vigo, Point de vue documenté, le film oppose deux mondes irréconciliables dans une Nice de l’entre-deux-guerres. D’un côté, la vieille ville et ses quartiers populaires ; de l’autre, la promenade des Anglais, oisive et bourgeoise, témoignant, comme l’écrit Vigo lors de la première présentation de son film de "grossières réjouissances placées sous le signe du grotesque, de la chair et de la mort, et qui sont les derniers soubresauts d’une société qui s’oublie jusqu’à vous donner la nausée et vous faire le complice d’une solution révolutionnaire".

C’est en notant les mouvements brusques et fébriles de la caméra, en suivant pas à pas les expériences de prises de vue et de montage, qu’une évidence finit par l’emporter parmi d’autres. Elle dévoile le film dans son absolue nécessité, celle d’une émotion brute, d’une vision poétique, au-delà du film formaliste d’avant-garde, au-delà du document politique et social.

À la quasi moitié du film, avant la folle danse du carnaval niçois, un plan panoramique fuyant les arcades blanches et lisses du Palace de la Méditerranée jusqu’au ciel, est suivi par un mouvement inverse qui descend cette fois entre les façades décrépies encadrant les rues étroites de la vieille ville, pour s’arrêter sur les blanchisseuses des lavoirs publics de la rue de Pertus ou de la vierge du Malonat, et le linge flottant aux fenêtres comme des centaines de drapeaux blancs. Nous sommes dans la Nice populaire, celle des jeunes porteurs de socca et des vendeuses de pissaladière, dans les quartiers pauvres. Avant même d’opposer dans un caniveau, le plan d’un chat apeuré au milieu des ordures à celui des danseurs chics et des gigolos d’un club mondain pour revenir à une Nice de carte postale et de nantis, Jean Vigo filme avec simplicité et tendresse quelques gamins jouant à la morra. Le jeu au passé immémorial, déjà évoqué dans le Satyricon de Pétrone."Philippe Bonnaves, "À propos de Nice : un poème filmé et un cri de colère anticonformiste signé Jean Vigo", leblogdocumentaire.fr, 2017 (consulté le 02/07/2018)

Titre

À propos de Nice

Éditeur

Gaumont-Franco-Film-Aubert

Date

1930

Source

Voir le documentaire sur YouTube (consulté le 15/04/2020)

Droits

Non libre de droits

Durée

22 minutes et 51 secondes