Description

[Sommaire Séminaire]

[Extrait]
L’expression de « Grand Tour » est d’origine britannique comme nombre des voyageurs qui s’y illustrèrent. Il n’est, semble-t-il, pas usité avant la fin du 18e pour désigner un art de voyager dont les origines remontent à la Renaissance. Dans les dictionnaires classiques, on trouve le terme de « tour » : « petit voyage fait en quelque lieu » (Furetière, 1691) que l’on voit encore dans le Dictionnaire dit de Trévoux (éd. de 1771). «Grand Tour » est inconnu. Les dérivés de « Grand Tour » peuvent, en revanche, être mieux datés, dans leur origine anglaise : « tourist » en 1780 et « tourism » en 1811. Très rapidement, à l’âge du développement des voyages (chemin de fer, etc.), ces termes prennent une coloration péjorative par rapport à celui de « voyageur » et de « voyage ». Les _Mémoires d’un touriste_ de Stendhal datent de 1838. Le « Grand Tour » signifie, au sens restreint, les voyages de formation effectués par la jeunesse aristocratique britannique en Italie. De fait, il désigne, plus généralement, les voyages en Europe réalisés dans un but certes de divertissement mais aussi de quête culturelle par toute sorte de personnages issus des milieux privilégiés. Le voyageur du « Grand Tour » se distingue des autres voyageurs dont nous étudions les relations par le fait qu’il ne s’agit pas, comme c’est toujours le cas à l’Âge classique (16e-18e siècles), d’un voyageur qui parcourt le monde pour des raisons professionnelles (marchand, missionnaire, naturaliste, etc.). D’une certaine manière, le voyageur du « Grand Tour » voyage « pour le plaisir », comme l’on disait au 18e siècle des peintres amateurs. Il voyage pour son agrément et pour se cultiver par la confrontation avec d’autres mœurs et, surtout, par l’ « autopsie », la vision directe des monuments de la culture européenne ancienne et moderne. Quand à l’accomplissement personnel du voyageur du « Grand Tour » se substituera la marchandisation du voyage naîtront les termes de « tourisme » et de « touriste ». C’est pourquoi le séminaire traitera de l’Europe entière, gibier culturel, et de toutes les nations qui voyagent ; il traitera aussi, entre Renaissance et milieu du 19e siècle, des diverses formes que les relations du « Grand Tour » prirent dans quelques langues européennes. Car notre voyageur appartient à monde qui lit et qui écrit, une infime minorité sur des routes où il croise les vagabonds et parfois un Rousseau se rendant à pied à Chambéry : « La chose que je regrette le plus dans les détails de ma vie dont j'ai perdu la mémoire est de n'avoir pas fait des journaux de mes voyages » (_Confessions_, livre IV). Mais Rousseau n’est pas un voyageur, c’est, comme beaucoup, un simple itinérant. Ce n’est pas le cas des voyageurs du « Grand Tour » où l’on trouve des princes sous pseudonyme – pour la discrétion et vivre un temps en bourgeois-, des érudits (« peregrinatio academica ») et des artistes, quelques snobs et beaucoup de jeunes gens. Les femmes seules sont rares (Mme du Bocage) ; sauf en ce qui concerne les Britanniques, intrépides amazones depuis longtemps (lady Mary Wortley Montagu en Italie). Les voyageurs pérégrinent. le plus souvent accompagnés - précepteurs souvent ecclésiastiques servant de chaperons aux jeunes aristocrates ; voyageurs suivis de valets parmi lesquels on découvre parfois un artiste paysagiste; ils suivent des itinéraires balisés ; ils fréquentent les mêmes auberges –souvent pas nationalité : les Français à l’hôtel de l’Ours à Rome, les Allemands à l’hôtel de Hambourg à Paris-; ils visitent les mêmes musées et les mêmes « cabinets de curiosités » tenus par les mêmes érudits aristocrates. Á partir de la fin du 17e siècle, les guides de voyage se multiplient : ils orientent le cheminement des voyageurs et nourrissent parfois discrètement leur narration (voir ci-dessous la bibliographie). Car que dire des relations du « Grand Tour » ? La plus grande part est restée manuscrite, car ce récit était considéré comme un document personnel, intime, à la rigueur familial, mais de toute manière devant échapper à l’impression.

Titre

L’Europe du Grand Tour : la relation de voyage à la découverte du vieux continent, de la Renaissance au Romantisme

Créateur

Éditeur

Centre de Recherche sur la Littérature de Voyage (CRLV)

Date

02/2009

Langue

Couverture temporelle

Sujet

Voyage, Grand Tour

Droits

Non libre de droits