Description

Avant-propos
[Extrait]
Regards croisés sur la Méditerranée au pluriel, conscient des risques du manichéisme et du « choc des civilisations », ce travail part du postulat que la Méditerranée est – elle le demeure – hétérogène et mouvante. Il réunit des réflexions qui, se basant sur « l’Histoire globale » et sur les représentations et les discours qui en découlent, tiennent compte de la géographie, de l’espace en tant que donnée déterminante dans la création artistique. La réflexion prend en considération le fait que le milieu et le climat, comme l’atteste Montesquieu et comme le ressent Meursault, déterminent le caractère de l’individu et, par là-même, sa culture et ses rapports à Autrui. Ici, le lieu méditerranéen est examiné comme tenant plus de la sémiosis que de la mimésis. Les diverses contributions en font la démonstration, et la géopolitique se trouve contrecarrée par une approche géo-poétique.
Dans le but d’élucider une question extrêmement complexe, ce travail diversifie les approches : la pluralité de la Méditerranée y est perçue à travers le prisme de la littérature, de l’Histoire, du cinéma… Mais ces études s’attellent surtout à montrer comment l’« interface » se mue en « intertexte ». Le motif de la rencontre, du miroir, du regard travaillé par l’analogie structure les réflexions qui refusent de conclure et optent pour une représentation critique, une représentation rejetant tout clivage. C’est l’expression de la pluralité de cet espace où « la relation » à l’Autre n’a jamais été linéaire parce que faite d’échanges et de tensions, d’harmonie et d’hostilité, de lyrisme et de rationalité. La représentation de la Méditerranée apporte ainsi un démenti aux tentatives de saisie taxinomique et téléologique.
S’appuyant sur des œuvres littéraires françaises (Alphonse de Lamartine, Jules Verne, Albert Camus…) et francophones (Malika Mokaddem, Kamel Daoud, Hélène Cixous, Colette Fellous, Albert Memmi, Hubert Haddad, Amin Malouf, Kateb Yacine, Kaouther Adimi…) mais aussi sur le cinéma, ce travail adopte une démarche historique et poétique pour interroger la pluralité des cultures et des appartenances du bassin méditerranéen. Le dénominateur commun est, de toute évidence, le refus d’une représentation idéalisée de la rencontre des races, des religions et des identités autour de la mer Méditerranée. Dans la production artistique, l’idéologie émerge et s’oppose au rêve de la fusion et de l’interpénétration. Dans sa diégèse, sa structure, son énonciation et son image poétique, l’œuvre se fait palimpseste et mémoire. Elle est sans cesse traversée par une Histoire où l’identité n’a jamais été une « donnée immuable » ou figée. En même temps, les artistes ne sont pas indifférents aux questions brûlantes de l’actualité sociopolitique : la complexité des liens intercommunautaires, la colonisation, le radicalisme religieux, l’immigration, l’intégration et le nationalisme étroit obsèdent et façonnent leur esthétique.

Titre

La Méditerranée au pluriel. Cultures, identités, appartenances

Titre Alternatif

Mare nostrum ? Frontières et conflictualités

Éditeur

Babel

Date

n°36, 2017

Langue

Format

p. 7-11

Source

Journals.openedition.org
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Droits

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