Description

[Plan Ouvrage]
Décrire les lieux, dire l'errance
Le voyage en sons et en images
Fictions du voyage
En voyage... Inédits
Comptes rendus

[Résumé]
Le voyage, c’est d’abord l’émigration de ses parents irpini vers Hanovre, puis celui du retour en Italie. Mais les voyages de Capossela se font aussi et surtout à travers les genres musicaux et artistiques, au sein d’histoires à la croisée du réel et du fantastique et via la multitude d’atmosphères et de références littéraires qui peuplent son œuvre. Si le début de la globalisation a plongé l’Homme dans l’ère dite postmoderne, où les notions d’espace et de temps sont en crise, à redéfinir, l’œuvre de Capossela exprime parfaitement l’instabilité de cette époque. Ses chansons vont et viennent dans mille directions, elles n’ont pourtant pour but d’arriver nulle part.
[Abstract]
Parlare di viaggio avvicinandosi all’opera di Vinicio Capossela sfiora la tautologia. Il viaggio è innanzitutto l’emigrazione dei suoi genitori irpini verso Hannover, poi quello del ritorno in Italia. Ma i viaggi di Capossela avvengono anche e soprattutto attraverso i generi musicali e artistici, nell’ambito di storie dove si incontrano il reale e il fantastico, passando per la moltitudine di atmosfere e riferimenti letterari che popolano la sua opera. Se l’inizio della globalizzazione ha immerso l’uomo nell’era cosiddetta postmoderna, in cui le nozioni di spazio e tempo sono in crisi e da ridefinire, l’opera di Capossela esprime perfettamente l’instabilità di quest’epoca. Le sue canzoni vanno e vengono in mille direzioni, eppure il loro scopo è di non portare da nessuna parte.

[Extrait]
Dans Le peintre de la vie moderne ( Charles Baudelaire, Le peintre de la vie moderne, Paris, Fayard, 2010), Charles Baudelaire donne une définition de ce qu’est pour lui un flâneur :
"Pour le parfait flâneur, pour l’observateur passionné, c’est une immense jouissance que d’élire domicile dans le nombre, dans l’ondoyant, dans le mouvement, dans le fugitif et l’infini. Être hors de chez soi, et pourtant se sentir partout chez soi ; voir le monde, être au centre du monde et rester caché au monde."
Cette description, et par conséquent ce qualificatif, semblent parfaitement s’accorder aux auteurs que sont Fernando Pessoa, James Joyce ou encore Charles Baudelaire lui-même. Mais paradoxalement le nom de chacun de ces écrivains est indissolublement lié à une ville : Lisbonne, Dublin et Paris. Vinicio Capossela n’est, lui, lié à aucune ville, à aucun thème, à aucun genre musical. Ou peut-être faudrait-il dire à de multiples villes, à une immensité de thèmes et à d’innombrables genres musicaux ? C’est un personnage errant aux mille racines, implanté dans ces lieux qui l’adoptent, ou plutôt qu’il adopte. Les voyages spatio-temporels peuplant son œuvre sont, en effet, une multitude. Et les points d’arrivée ne sont que de futurs points de départ, qu’il élit temporairement comme des lieux et des époques lui appartenant, étant siens. À l’heure où les débats politiques sur le ius soli et le ius sanguinis font fureur en Italie, le natif d’Hanovre semble opter pour le « ius cordis ». Dans son œuvre on voyage en effet à travers des pays et des temps que son cœur a choisis pour patrie, le temps d’une pause. Si, comme le dit l’adage, la meilleure façon de s’adresser au monde c’est de lui parler de son village, alors Capossela chante ses bourgs, ses villes, ses pays, ces lieux qu’il a choisi de faire siens dans son œuvre. Et bien qu’ils ne soient siens qu’un temps, ils le sont à plein régime. Le dernier en date, la Grèce, l’est comme mélodie de l’album Rebetiko gimnastas, comme théâtre du film-documentaire Indebito, écrit par Vinicio Capossela et réalisé par Andrea Segre ou encore comme muse de son recueil de récits Tefteri.
[...]Et en effet son œuvre est un voyage imaginaire. Elle est riche qualitativement mais aussi en quantité, en variété. Si la fin de la modernité et le début de la globalisation ont plongé l’Homme dans l’ère dite postmoderne, dans laquelle les notions d’espace et de temps sont en crise, à redéfinir, l’œuvre de Vinicio Capossela exprime parfaitement l’instabilité de cette époque. Si ses chansons viennent et vont dans mille directions, elles n’ont pourtant pour but d’arriver nulle part. Elles se meuvent à travers ce labyrinthe grandissant qu’est son œuvre, à la recherche vaine de son centre et d’une demeure stable, mais la fin du voyage ne pourra être décrétée que par le temps et par les énergies s’épuisant. C’est ce qu’illustre le morceau Il ballo di San Vito dans lequel, sur un air très endiablé de tarentelle, il chante :
Dentro il cerchio del vodoo mi scaravento
e lì vedo che la vita è quel momento
Scaccia, scaccia satanassa
scaccia il diavolo che ti passa
scaccia il male che ci ho dentro o non sto fermo
scaccia il male che ci ho dentro o non sto fermo

A noi due balliam la danza delle spade
fino allo squarcio rosso d’alba
nessuno che m’aspetta, nessuno che m’aspetta
nessuno che mi aspetta o mi sospetta

Il cerusico ci ha gli occhi ribaltati
il curato non se ne cura
il ragioniere non ragiona
Santo Paolo non perdona

Ho il ballo di San Vito e non mi passa
Ho il ballo di San Vito e non mi passa

Questo è il male che mi porto da
trent’anni addosso
Fermo non so stare in nessun posto
Rotola rotola rotola il masso
rotola addosso, rotola in basso
e il muschio non si cresce sopra il sasso
e il muschio non si cresce sopra il sasso

Scaccia scaccia satanassa
scaccia il diavolo che ti passa
Le nocche si consumano
Ecco iniziano i tremori
della taranta, della taranta
della tarantola...
l ballo di San Vito peut être entendu comme la tarentelle pratiquée dans certains villages du sud de l’Italie la veille de la fête de San Vito, le 14 juin, ou comme la danse de Saint-Guy, l’appellation commune de la chorée. Si au Moyen Âge les malades de chorée étaient brulés vifs, parce qu’on considérait qu’ils étaient atteints par le démon, selon les différentes légendes la tarentelle était une danse permettant de guérir les morsures de tarentule ou les malades de chorée. Pour d’autres encore elle est une façon d’expulser les démons qui sont en nous. Dans la chanson de Capossela la tarentelle semble être une métaphore de sa façon de vivre : il faut être perpétuellement en activité, afin d’éviter que le mal de vivre ne s’installe.
On retrouve dans ce morceau, et dans l’album homonyme de 1996, certaines constantes de la production caposselienne. Tout d’abord cette idée de l’équilibre que l’on trouve dans le mouvement (parfois même endiablé) et non dans la stabilité. De plus, les points d’ancrage traditionnels sont ici renversés (il ragioniere non ragiona / Santo Paolo non perdona…), comme pour signifier la perte de repères à notre époque et le besoin d’en créer de nouveaux, en repartant de zéro. On retrouve également une utilisation musicale et rythmique des mots très caposselienne : ils semblent être un instrument supplémentaire parmi les instruments. Certaines paroles sont choisies pour leur sonorité parfois plus que pour ce qu’ils disent sémantiquement (cela explique l’omniprésence d’onomatopées, d’allitérations et d’assonances dans son œuvre). Si, dans une chanson, le texte est souvent le pendant rationnel de l’émotion suscitée par la musique, ou vice versa, chez Capossela, les paroles contribuent souvent à provoquer des sensations épidermiques, presque viscérales.

Table des matières

Quelques données biographiques
Des décors variés
Le voyage à travers les œuvres d’autrui
Un vagabondage postmoderne
La soif de voyager

Titre

Vinicio Capossela entre voyage, flânerie et cosmopolitisme

Titre Alternatif

in Voyages de papier. Le voyage en sons et en images

Éditeur

Revue Italie, n°17/18

Date

2014

Langue

Format

2 volumes, 958 pages, p. 487-501

Identifiant

https://doi.org/10.4000/italies.4855

Source

OpenEdition Journals
Lire l'article en ligne (consulté le  02 juin 2022)

Droits

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