Description

Extraits / citations :
« Comme elle est, grâce aux Grecs, une mer littéraire, les professeurs la croient à tort dominée par l’homme, assagie par la poésie. C’est le contraire. Tout ce qui touche à la Méditerranée tient de l’éruption, du torrent, de la tornade. Les invasions s’y abattent sans prévenir [ ... ] . Les croisades ne sont qu’une suite de coup de théâtre. Les batailles [ ... ] sont des retournements foudroyants . » p. 15 (introduction) .
« Non seulement la Méditerranée aime l’imprévu, mais elle se refuse au prévu et ne fait rien de ce qu’on attendait d’elle. » p. 16 (introduction).
« Auprès de l’Atlantique, la Méditerranée est un lac ; auprès du pacifique, une mare ; mais une mare royale, couronnant le sommet de l’édifice planétaire ; sans elle, la terre ne s’enorgueillirait pas de tant de continents ; rien en effet, ne distinguerait l’Afrique de l’Europe et l’Asie de l’Afrique. » p. 19 (mirages méditerranéens).
« La Méditerranée, c’est l’anti - désert : toute son histoire constitue d’ailleurs une lutte des sédentaires contre les nomades, de la maison de pierre contre la hutte, de la vigne aux racines profondes contre les hâtives moissons des hordes cavalières, des Latins contre les Slaves, des agriculteurs contre les pasteurs, de la coutume contre la loi, de la pierre contre le sable. La Méditerranée a une position cardinale non seulement dans l’histoire, mais aussi dans la géographie humaine. Les réseaux politiques s’entrelacent sur ses flots comme autant de tapis au point noué jetés les uns sur les autres. » p. 21 (mirages méditerranéens).
« Non content d’avoir ouvert tant de voies aériennes transcontinentales et transocéaniennes, notre âge est en train de reconstruire un chemin effacé depuis le IIe siècle : je veux parler du circuit terrestre et ensoleillé qui court désormais autour de la Méditerranée comme les anneaux autour de Saturne . » p 23 (circumméditerranée).
« La Méditerranée a désormais sa corniche autour du cycle de l’olivier. Cette œuvre appartient à tous : elle est française, anglaise, allemande et italienne, chrétienne et musulmane. Pacifiste ou stratégique, touristique ou fanatique, peu importe, elle est : le contact est établi et le courant passe ; comme un nouveau poumon irrigué par un sang circulant plus libre, la Méditerranée va permettre au monde de respirer plus à l’aise. » p. 26 (circumméditerranée).
« Dans l’Afrique du Nord qu’il appelle « le plus grand musée archéologique du monde », M. Louis Bertrand, partant du Cap d’Antibes, a relevé pieusement une à une toutes les empreintes de la latinité et M. Paul Valéry, triplement méditerranéen puisque Sète, Trieste, Nice le réclament, a écrit sur cette mer des pages immortelles. » p 27 (circumméditerranée).
« Pour les écrivains et les artistes qui sont venus se fixer au bord de ses rivages sans marées, la Méditerranée est une mer de paix et d’union, une eau - mère chargée d’un sel qui est symbole non de stérilité mais de durée, un bain miraculeux d’où nous sortons guéris, lavés de nos ulcères moraux après chaque immersion. Elle nous offre d’abord une grande leçon d’harmonie spirituelle et architecturale. Impossible d’écrire près de ses profondeurs bleues un livre non construit ; impossible, sous sa lumière crue, dans son air sonore, de penser lourdement en poncifs vulgaires ; les chefs - d’œuvre antiques conçus sur ses bords vouent une fois pour toutes le créateur de fictions au respect du cadre éternel qu’ils ont tracé à l’œuvre d’art. Abandonnant aux pays nordiques les bariolages violents, la Méditerranée est le climat apaisé des tons fins, des beiges, des roses, des blancs doux, de la rouille dorée, des gris d’argent, chers à Corot comme à Picasso ; c’est la patrie du rythme mélodieux, non celle des sons disjoints et du tumulte dis cordant . » , p. 31 (statues de sel et de marbre) .
« Etrange nature que celle - ci qui, sans le soleil n’est plus rien ! Ciel sans nuage et sans oiseaux, mer sans vents ni marées, terre sans saisons, presque sans animaux ; quand la nuit descend, après l’incandescence du jour, elle crée une sorte d’espace métaphysique, de stratosphère vide, aussi inquiétant que les pires brouillards. Mais quand paraît la lune, dans toute sa splendeur précise, elle sculpte chaque rocher, argente les eucalyptus, blanchit les oliviers (ces oliviers qui, même en plein jour, ont quelque chose d’humain), aggrave le deuil des lauriers, des chêne - liège, des caroubiers et des myrtes funèbres. » p. 34 - 353
« Elles s’avancent en ligne de bataille : Porquerolles, Port - Cros (qui détache, en face, le rocher nu de Bagaud), et l’Île du Levant, qui regarde la C ôte d’Azur et la haute mer. Cette année, j’arrivais de Tunisie et notre hydravion volait à plus de deux mille mètres. Le temps était splendide. On apercevait toute la c ôte, depuis le Cap d’Antibes jusqu’à Montpellier ; derrière s’étageait les gradins des Maures, de l’Esterel, des Alpilles [ ... ] . Jamais mon œil n’embrassa un aussi beau panorama, jamais je ne vécus de minutes aussi enivrantes que cette entrée triomphale d’avril, dans l’air français, tandis que les îles d’Hyères se rapprochaient sous nos ailes. » p. 53 ( Îles d’Hyères).
« Marseille toute entière rêve de mer, mais sans désirer que ce rêve devienne une réalité. Non loin de là, les équipeurs de yachts, les négociants en vernis et étoupes, les astiqueurs de cuivres, assis sur des voiles en paquets, les marchands d’oursins et de clovisses de la rue Fortia, les photographes - minute, les vendeurs de cacahuètes, les gosses à faciès kabyle qui se battent à coups de galoches, les moukères, les Arméniens tailleurs d’habits coloniaux, les cireurs de bottes, les Salomés algériennes, derrière des grilles, comme des fauves, les Israélites ottoman s, les revendeurs de vieux dentiers, les sidis à fez, les nègres à cotte bleue de mécanicien, évocateur s de rivages lointains auxquels ils n’ont aucune envie de retourner, tous, et les marins eux - mêmes, préfèrent Marseille à la mer, Marseille à la France , Marseille à tout ... » , p. 59 (Marseille).
« Ce feu vert, à l’entrée de la rade, c’est Toulon [ ... ] . Villefranche, Marseille, Toulon, c es villes du Midi de la France sont aussi vieilles que la civilisation méditerranéenne [ ... ] . Toulon tira sa racine du mot grec telos qui veut dire « station militaire » et mérite encore son nom. » p ; 67 - 68 (Toulon).
« I l y a aussi les glorieux soirs où, à la fin des manœuvres navales, l’escadre de la Méditerranée rentre à Toulon, précédée d’airs de valse portés par l’eau. En ligne elle s’avance, surmontée d’immenses colonnes noires dans le ciel de soie rose. Un coup de canon salue le coucher du soleil. Alors s’allume, à l’entrée de la rade extérieure dont je parlais, ce beau feu vert, véritable émeraude au doigt de la nuit. » (Toulon) p. 80. « Quand on a ‘ ‘ trouvé’’ la Corse, on ne la quitte pas aisément. Pendant plusieurs semaines, nous longe âmes les falaises, les plages désertes, les bois odorants, les grottes pleines d’ombres lumineuses, et doublâmes les tours gênoises en sentinelle au haut des promontoires [ ... ] . De Calvi à Bonifacio, nous vécûmes tout un mois d’avril la seule vie qui mérite ce nom : celle qu’on mène, à bord d’un voilier, en Méditerranée ... ». p. 98 (La Corse).
« La seule beauté de la Tunisie, c’est son arrière - pays : c’est Tozeur et les oasis ; ce sont les pêcheries d’éponges du golfe de Sfax ou la désolation mystique de Kairouan, ou le pittoresque bleu et blanc de Sidi Bou - Saïd et la chute de ses falaises sanglantes dans la mer, au Cap Carthage avec son phare implacable sur les flots. » p. 139 (Tunis).
« Sur cette terre demeurée grecque en dépit des invasions normandes ou africaines, les légendes persistent et les métamorphoses se perpétuent. Les rochers lancés par Polyphème vers les vaisseaux d’Ulysse sur la côte d’Aci - Reale, attestent la vérité de la Fable. La nouvel l e Syracuse avec ses avenues de laurier s rose s semble vouloir se souvenir du plus gracieux des mythes d’Apollon. » p. 155 - 156 (Syracuse). « Nous débarquons à Beyrouth : derrière la ville s’élève l’amphithéâtre du Liban ; les cascades, les neiges, l’ombre des cèdres et des châtaigniers, la verdure, les gorges sauvages, tout ce qui exalta l’imagination de l’Orient aride, monte en gradins sous nos yeux. Tout le Liban qu’a décrit Gérard de Nerval est resté aussi intact qu’il y a un siècle, sous l’occupation des Turcs et des Albanais. » p. 203 (Des Beyrouth à la Palestine).
« Si je regarde ainsi la Méditerranée, avec ses c ôtes découpées, ses péninsules pointues, elle me fait penser à ces beaux onyx dont les veines dessinent des objets bizarres ; deux mares coupées par une pierre de gué, la Sicile, qui permet de sauter d’Europe en Afrique ; ou une fleur à deux pétales dont l’Italie serait le cœur ; ou deux yeux entourés de rides, rides alpines, pyrénéennes, dinariques ... Je la vois aussi pareille à une fosse cernée de gradins où se pressent et se penchent les nations dont j’aperçois les t êtes sur les hauts plateaux auvergnats ou thraces, libyques ou aragonais, russes ou syriens. Dans cet amphithéâtre méditerranéen, depuis des millénaires se joue toujours la même pièce ; les forts l’appellent Mare nostrum et les faibles Mare vestrum [ ... ] . La Méditerranée n’est que pierre et eau ; sur ses rivages sans forêts il n’est d’autre bois que l’olivier, qui serait plutôt une grande racine sortie de terre pour vivre dans le ciel ». p. 226 (en regardant une carte).

Table des matières

Table
Préface
Introduction
Mirages méditerranéens
Circumméditerranée
Statues de sel et de marbre
Nuits d’août
Les phares
Septembre méditerranéen
Octobre méditerranéen
Presqu’île de Giens
Iles d’Hyères
Marseille
Toulon
Nice
Villefranche - sur - Mer
Cannes
Pâques dans le Midi
La Corse
Barcelone
Côtes de Catalogne
Les Iles Baléares
Cadix
Tanger
Alger
Oran
Tunis
Tourisme nord - africain
Taormina
Syracuse
Naples
Riviera ligure
Gênes
Du Pirée à Athènes
Egine
Mont Athos
Chio
Nauplie
De Beyrouth à la Palestine
D’Alexandrie au Caire
En regardant une carte

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