Description

[Résumé]
La chanson napolitaine est reconnue comme l'un des plus importants répertoires de chansons dans le monde ainsi que comme l'un des tous premiers exemples de musique populaire. Cependant, dans les années 1960 alors que les jeunes musiciens napolitains essayaient d'absorber et de développer les tendances contre-culturelles se développant sur l'ensemble du territoire italien à l'époque, un tel répertoire semblait se dresser en ennemi sur leur chemin. Cet article montre comment la musique napolitaine des cinquante dernières années a du s'écarter ou remodeler la chanson napolitaine classique afin de combattre son hégémonie et trouver son propre chemin, dans un pays changeant à vitesse grand V. Ce n'est qu'après un travail de « déconstruction » que la chanson napolitaine fut reprise et acceptée, enorgueillissant une nouvelle génération de chercheurs et de musiciens enthousiastes.
[Abstract]
Neapolitan Song is recognized as one of the most important repertoires of songs in the world and one of the first examples of popular music. Yet, in the 1960s, when the young Neapolitan musicians tried to absorb and develop the countercultural trends of the time which were spreading in Italy, such a repertoire seemed like an enemy on their way. This essay tells how the Neapolitan music of the last fifty years had to discard or reshape the classic Neapolitan Song in order to fight its hegemony and find its way to modernity in a country that was changing at fast speed. It is only after this work of ‘deconstruction’ that Neapolitan Song was recovered and re-accepted, boasting now a new generation of enthusiastic scholars and performers.
[Extrait]
La chanson occupe une place centrale dans la culture napolitaine. Bien que la ville ait été une des capitales de l’Opéra, c’est ici que l’Italie développa son répertoire de chansons modernes le plus fameux, la chanson napolitaine née entre les xixe et xxe siècles, produit d’une bourgeoisie aux goûts continentaux. La chanson s’intégrait dans un grand projet de modernisation qui impliquait autant la culture que l’urbanisme. Tandis que le second libérait les rues d’une culture folklorique locale pour y installer un véritable environnement capitaliste, la première pourvoyait ce nouveau scénario social d’une forme de divertissement qui lui serait destiné. Ainsi, la chanson napolitaine se développa comme partie intégrante de l’identité d’une classe moyenne locale émergente, mais elle était également sans cesse reprise et revisitée par les classes populaires - comme ces musiciens itinérants appelés « posteggiatori » (Artieri, 1961) qui adaptaient les chansons en style folklorique, permettant ainsi au commun des mortels de les reconnaître immédiatement. Par le charme de la chanson napolitaine, les valeurs conservatrices de la bourgeoisie devinrent hégémoniques localement, et l’on inventa la Napoletanità (une sorte de « vision napolitaine du monde »), une idéologie unificatrice qui permettait de garantir une cohésion interne, empêchait les conflits de classes de voir le jour et générait une fierté citadine transversale. Il est également vrai, comme le remarque l’écrivain Raffaelle La Capria, que c’est la Napoletanità qui a donné aux citoyens de Naples, y compris ceux de basse extraction cet esprit européen, ce sens de l’humour et cette ironie si typiques (La Capria, 1986, 39).

Table des matières

Titre

Musique et contre-cultures en Italie : la scène napolitaine

Titre Alternatif

in Contre-cultures : théorie & scènes
Scènes

Créateur

Éditeur

Revue "Contre-cultures"

Couverture temporelle

Format

Article scientifique, p. 67-83

Source

Lire sur OpenEdition Journals (consulté le 17 juin 2023)

Droits

Non libre de droits