Description

[Extrait]
Chemin faisant et par petites touches, un aller et retour entre les mythes d’hier et d’aujourd’hui.
Platon comparait les hommes à “des fourmis ou des grenouillesautour d’un étang”. Cet étang est notre mer, notre mère qui nousrepère et crée pour nous l’espace de l’intime et du familier. Une marequi résume l’univers, qui, lorsque je suis loin de chez moi, me faitparler à la première personne du pluriel. Un “nous” mystérieux sur-git soudain, changeant, chargé d’émotion, un “nous” qu’on trouveen poésie, chez Ritsos par exemple. Insaisissable. Inexplicable si cen’était que nous sommes les batraciens ou les hyménoptères parta-geant le même point d’eau. Riverains de l’étant méditerranéen. Longtemps la Méditerranée a été le cœur du monde. Les terres qui rayonnaient autour d’elle, la scène du théâtre de l’humanité.Mosaïque de peuples, de cultures, savant tissage d’histoires et demises en abyme, elle inscrit son horizon dans les esprits et les récitsdepuis l’invention de l’homme.
La Très-Verte des Egyptiens, la
Grande Mère (Hayam Hagadol) des Hébreux, la mer Intérieure ou laNôtre des Romains, la mer Blanche (Akdeniz)des Turcs, la merBlanche du milieu (Al-Bahr Al-Abyad Al-Muttawasit)des Arabes, lamer au Milieu des terres (Mesogeios Thalassa) des Grecs... Elle règnesur tous les temps de Gaza et Palerme à Gibraltar, aux confins de lamer Noire (du Phase aux colonnes d’Héraclès, comme disaient lesAnciens). Parcourue en tous sens... Odysseos errant ; un taureaublanc écumant traversant vers la péninsule, la belle Europe sur sondos ; la triste Io, inconsolable, franchissant le Bosphore ; Aréthuse fuyant Alphée, et Parthénope débarquée à Cumes ; Héraclès dans la Crau ou à l’embouchure du Guadalquivir ; les trois Maries etquelques apôtres dans une barque sans voile, ni rames ; les voyagesde Paul ; les avancées des Ommeyades ; les traversées clandestines...Sans compter les déplacements, les migrations, las idas y vueltas: despeuples entiers jetés sur les routes, au hasard de l’histoire, poussés parla hargne, la peur, la faim, les rêves ou l’esprit de conquête... Touts’est joué sur des brisures, des exils, des franchissements : Didon venuede Phénicie, Enée de Troie, Odysseos tournant sans cesse, Léda à larecherche d’une île, Cadmos, Dionysos, Alexandre, Protis...Les fondateurs de cités, de civilisations, sont ici des voyageurs, desétrangers. Et quelquefois des dieux...Si les traces des pas, des chars, des chevaux, si les sillages des embarcations s’incrustaient dans sa chair et y restaient gravés, cet espaceserait griffé en tous sens, tissé, hérissé de stries enchevêtrées, aux des-sins plus complexes que ceux d’un mandala, d’une toile d’araignée,reliefs en creux à l’infini..

Table des matières

  1. Le fil d’Ariane
  2. Fragmentations
  3. L’art et la vie
  4. Résurgences
  5. Consolation
  6. Le feu

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21e siècle
MEDITERRANEE

Titre

La Méditerranée, fragments d'un discours amoureux

Titre Alternatif

In Revue " La pensée de midi", 2007/3

Éditeur

Paris, Actes Sud

Langue

Format

N° 22, pp. 16-22

Source

Lire sur cairn.info (consulté le 27 juin 2023)

Droits

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