Description

Les peintres Courbet et Matisse, de 1850 à 1925, s'enflamment pour la "grande bleue" et témoignent de la lumière, de la couleur, des sensations de liberté et de volupté qu'elles procurent dans un pays jusque là ignoré des artistes, habitués au voyage à Rome ou en Orient.

"C'est surtout pour mourir que, longtemps, on est descendu au bord de la Méditerranée", rappelle Françoise Cachin, directrice des Musées de France et commissaire de l'exposition.

"Cette côte parfumée était surtout devenue un avant- goût du paradis pour phtisiques anglais, français ou russes, rassemblés dans les célèbres villes de santé que sont Hyères, Cannes, Nice ou Menton".

Voilà pour la côte. Quant à la mer, on n'en parle pas dans cette première moitié du XIXe siècle, si ce n'est pour évoquer la saleté des ports, leur caractère "sordide" ou "canaille".

Le premier grand artiste à découvrir la Méditerranée, à la peindre sans allusion antique, sans portique, ni référence à l'Italie ou à Poussin, mais pour sa seule grandeur, fut, au cours de l'été 1854, Gustave Courbet.

"Le bord de mer à Palavas", où un homme salue d'un coup de chapeau l'immensité bleue-verte, est un des plus beaux hommages à la mer dont Courbet disait qu'elle lui donnait "les mêmes émotions que l'amour".

Cette toile amorce un riche parcours pictural et thématique: paysage méditerranéen, rivages, rochers, mythologies, villégiatures, ports, pêches voiles, vues sur la mer.

Les peintres rivalisent de couleurs pour exprimer leurs émotions devant le scintillement de la mer, les ombres du soir, la transparence de l'air.

"Je suis installé dans un pays féérique !", s'exclame Claude Monet. "Tout est flamme de punch et gorge-de-pigeon", ajoute-t-il, tentant de décrire les ocres et violines du "Sentier au cap Martin" (1884).

De Collioure à Menton, ou sur la côte espagnole et italienne, les couleurs complémentaires opposées - le froid du bleu, la chaleur de l'or - se déploient. Le grand peintre divisionniste Paul Signac évoque d'abord la lumière et transcrit sur sa toile "l'atmosphère chaude et enveloppante du Midi, où la lumière pénétre l'ombre et la volatilise presque".

Ses touches posées côte à côte, fortement contrastées, donnent l'illusion d'un miroitement de la mer, d'une vibration de soleil, se retrouvent aussi chez Henri-Edmond Cross, Théo van Rysselberghe et jusque dans le célèbre "Luxe, Calme et Volupté" (1904) qu'inspirent à Matisse les vers de Baudelaire.

Bientôt, elles s'élargissent, notamment pendant la période du Fauvisme (Braque, Derain, Matisse à nouveau, Dufy) et éclatent sous le pinceau de Bonnard ("J'ai eu un coup des mille et une nuits") plongé dans des rêveries enchantée d'où surgissent la "Femme au perroquet" et de vibrantes harmonies de roses et d'ocres.

Picasso déclare: "Chaque fois que j'arrive à Antibes, je suis repris par cette Antiquité", celle qui débouche sur la "Flûte de Pan" de 1923, sa mythologie personnelle, son bestiaire, ses baigneuses géantes.

Titre

"Méditerranée" ou l'éblouissement des peintres

Éditeur

La Dépêche du Midi (périodique ; France ; 1947-....)

Date

2000

Langue

Couverture temporelle

19e

Format

Article de presse

Source

La Dépêche (consulté le 30/03/2020)

Droits

Non libre de droits

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